Dans une petite ville du Kansas, les filles Roanoke sont enviées de tous. Belles, jeunes et riches, elles vivent avec leurs grands-parents sur le domaine familial, au cœur des champs de blé. Quand Allegra disparaît, après la fin tragique qu'ont connu Camilla, Penelope et Eleanor, toutes filles de la lignée Roanoke, sa cousine Lane part à sa recherche. Elle découvre de sombres secrets de famille.
Lors du prologue de Les filles de Roanoke, on s'attend à mener l'enquête, partir à la recherche des sombres secrets qui hantent les murs de Roanoke. Pourtant, lorsque Lane revient dans cette maison où elle n'a passé qu'un été dix ans auparavant, elle brise la glace, attaque de front les tabous de cette famille pervertie. Ainsi, c'est très rapidement que je me suis doutée du fin mot de l'histoire, de son dénouement, et ai ainsi compris que l'enquête elle-même n'était pas véritablement le but de ce roman.
L'auteure traite ici la psychologie de chacun de ses personnages avec minutie.
Lane a conscience de la nature du mal qui ronge Roanoke et ses filles, c'est d'ailleurs pour cela qu'elle en est partie. Mais elle découvre à ses dépends combien l'histoire de cette famille est ancrée en chacun de ses membres, elle comprise.
J'ai trouvé importante la manière dont l'auteure semble défendre certaines idées. A plusieurs reprises, cela est pointé du doigt et rediscuté au travers des réflexions de l'héroïne : ce qui parait être un l'amour interdit n'est ici qu'une prison battit sur des années de solitude, d'abandon et de souffrance. Chacune des filles de Roanoke subissent la même emprise, sont victime d'une manipulation à base de tendresse et de sourire qui leur donne un temps le sentiment d'être unique et de n'exister que pour cette seule raison.
On ne parle pas de viol. Pourtant il parait clairement dénoncé. Plusieurs fois sont évoquées les notions de responsabilité, de culpabilité et de vulnérabilité. Qu'importe le consentement manifeste de chacune de ces femmes à l'enfance bafouée, elles sont victimes d'une emprise contre laquelle il leur était impossible de lutter.
Amy Engel nous offre une plume toujours aussi addictive, ici bien plus crue et violente que celle qu'on lui a connue dans The Book of Ivy. Le lecteur est pris au piège par cette ambiance lourde et chaude d'une bourgade du Kansas où tout le monde sait mais chacun se tait. Elle traite d'une histoire terriblement malsaine, mais l'écriture de l'auteure nous montre qu'elle-même ne l'est pas. C'est un point important à savoir qu'elle ne légitime en aucun cas les actes sordides qui sont évoqués dans son roman, bien au contraire.
En somme, une lecture intéressante assez éloignée de ce que j'ai l'habitude de lire. C'est oppressant et dérangeant, ce qui ne plaira certainement pas à tout le monde. Lane est d'une franchise assez brutale qui permet de dynamiser un récit où règnent le mensonge et le tabou. L'alternance entre passé et présent ainsi que l'intégration de courts textes sur chacune des filles de Roanoke m'a plu. La fin m'a laissé un goût d'inachevé, de tristesse et de vies perdues en vain. Non, ce roman est loin d'être rose. J'aurais souhaité que les sujets forts et intéressants qu'il aborde soient traités différemment, par un autre biais, car certains éléments m'ont semblé vide de sens. Néanmoins cela reste une relativement bonne lecture. Pas véritablement agréable car particulièrement glauque, mais une bonne lecture.
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